Histoire d'un symbole désacralisé par la culture "mainstream" et la publicité.
Le père Noël est bien le personnage fictif qui a le plus de mal à défendre son avis, son image publique... Si la majorité s'accorde à reconnaître que ce personnage indissociable de la culture de masse et des fêtes de fin d'année pour la société occidentale, est apparue la première fois en 1822 dans "The night before Christmas" de Clement Clark Moore (1779-1863). Cette entité à l'image apparente joviale, au petit ventre bien rebondi qui fait le bonheur de tous, en apportant de fabuleux présents aux enfants, d'homme à la barbe blanche fournie rassemblant les familles sous le " beau sapin" est cependant sujet à controverses.
Après de nombreux débats sur le pourquoi ce monsieur s'habille-il en rouge plutôt qu'en vert ou bleu, j'ai décidé de ne pas m'impliquer dans ces choix vestimentaires mais bien d'aborder son rapport avec la communication de masse comme vecteur d'une image qu'il a du mal à contrôler dans l'évolution de notre rapport à la société.
Le Père Noël vu par Coca-Cola, Haddon Sundblom, 1964
Père Noël, égérie de Coca- Cola
La société Coca-Cola souhaité inciter les consommateurs à boire cette célèbre boisson rafraîchissante non seulement en été, mais aussi en hiver. Pour cela, une première campagne fût entamé en 1922 qui avait pour slogan " Thirst Knows No Season" soit en français "La soif n'a pas de saison". Il fallait associer cette campagne avec un symbole fort de l'hiver qui rassemblerait les consommateurs, les familles autour d'une même et unique cause. La publicité, forme par excellence de communication de masse ayant pour démarche de cibler l'attention d'une cible visée afin de l'inciter à adopter un comportement souhaité.
C'est dans cette démarche et rapport particulier aux images, que la firme fît appel en 1931 à l'illustrateur américain d'origine suédoise Haddon Sundblom pour créer l'image publique du Père Noël.
Haddon Sundblom dit "Sunny", né le 22 juin 1899 à Muskegon et mort le 10 mars 1976 à Chigago, illustrateur américain connu pour ses Pin-Ups et ses publicités du "Père Noël" pour The Coca-Cola Compagny.
C'est réellement avec Haddon Sundblom que l'image affective et populaire du Père Noël est née dans le contexte créatif particulier qu'est celui de la publicité.
Jusqu'en 1964, Sundblom va réaliser chaque année de nombreuses peintures à l'huile mettant en scène le personnage du Père Noël dans diverses situations. C'est ainsi que l'on peut le voir dans son atelier à préparer de nombreux présents, lire son courrier, jouant avec des enfants, s'amusant, riant avec des lutins, apportant et installant des cadeaux dans le salon de nombreuses familles.
Voilà notre gros bonhomme à la face identifiable par tous, avec son beau costume si populaire et dont l'image s'exporta dans tous les pays du monde. Une superstar était née, avec une esthétique particulière, un symbole vivant de l'attachement familiale...
Puis tout a dérapé...
Le Père Noël n'a pas seulement été surpris en train de boire du Coca-Cola en cachette, mais suite à son succès, on le retrouve cette fois ci et toujours dans les années 50 comme visage de marque pour fixer l'attention de consommateurs pour une tout autre cause...
Et une dernière image qui m'a inspirée pour cette article découverte par hasard en 2009 :
Mais me dirais- vous c'est l'époque qui voulait ça? Parce que déontologiquement c'était dans la norme, que c'était l'opinion en faveur de la majorité et une pensé collective et le reflet d'une société.
Et c'est justement là que les images sont percutantes car elles mettent en relief notre avis personnel, notre jugement face à la société de consommation. Si l'on réagit avec un jugement de valeur en voyant ces images (c'est bien/ c'est mal/ c'est drôle/ c'est inadmissible...) c'est qu'elles nous donnent le moyen de nous questionner sur la société de masse elle même et notre rapport particulier avec cette dernière.
La publicité influant sur les désirs et les identités des personnes et des groupes humains, en changeant peu à peu leurs modèles sociaux-culturels, certaines normes alimentaires et comportementales ainsi que leurs pratiques sociales et tout ceci dans le contexte évident d'un mondialisation des images, touchant la mémoire collective et personnelle.
Dans ce cas précis et particulier, la publicité met également en jeu l'image d'un personnage qui n'est pas un être vivant, puisqu'il s'agit du Père Noël. Notre regard moderne sur le sujet, et avec beaucoup de recul, tend à nous montrer qu'il coexiste une image sacralisé de ce symbole vivant de l'enfance en même temps qu'une image commerciale et aujourd'hui moralement condamnable par notre société particulière à notre époque donné.
C'est véritablement le regard que l'on porte personnellement sur ce sujet qui fait toute la différence...
Mais le Père Noël n'est-t-il pas le reflet lui même de notre rapport à la société et la culture de masse des images?
N'est-il pas au final, simplement plus humain qu'il n'y parait alors qu'il n'est qu'une entité fictive?
Une invention à visé commerciale qui commet des erreurs, évolue, a des travers, des déboires, mais avec lequel on entretient des souvenirs, des émotions particulières...
Il faut se méfier des images, elles peuvent déformer notre perception du monde, des autres, dans notre société et c'est peut être la morale caché de cette histoire, autre fable d'un personnage particulier de l'histoire collective...
Dans ce cas précis, je ne le défend plus...